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Devenir la meilleure version de soi-même ?

Pas une si bonne idée …

Le 5 novembre 2023, 

par Pauline Guérisse

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Nous sommes dans une société de performance et d’évaluation. Cet état d’esprit imprègne à peu près tous les aspects de notre société : le travail, l’éducation, la vie privée, la gestion de son corps. Les notions d’objectif, de rentabilité, de réussite, sont omniprésentes.

Ce n’est pas étonnant si on les retrouve dans le domaine du bien-être et de la psychologie. Il  est très courant qu’on démarre une thérapie avec un objectif précis à atteindre et qu’on se fixe un délai pour y parvenir. On demande à la thérapie d’être efficace. Dans un sens cela se comprend. Il est logique de vouloir trouver des solutions à ses problématiques, légitime de vouloir tendre vers un mieux-être le plus rapidement possible. Mais d’un autre côté il est dommageable de transposer des valeurs trop volontaristes au domaine de la thérapie. Le cabinet du thérapeute et le lien même entre thérapeute et  patient sont des creusets de transformation. La transformation n’implique pas que nous ayons à devenir quelqu’un d’autre par une action volontaire. Il s’agit davantage d’un processus au long cours de connaissance de soi qui amène à un équilibre. La liberté d’être, tel qu’on est, dans tous ses aspects, est l’ingrédient essentiel pour que l’alchimie s’opère. C’est un lieu où peuvent se vivre les aspects sombres ou lumineux sans qu’il leur soit posé une étiquette « positive » ou « négative », «  à garder » ou « à jeter ». Tout cela est qui nous sommes et demande à être conscientisé, embrassé intérieurement. La conscience que l’on pose, sans jugement, est elle-même la voie qui amène à un équilibre.

Cet état d’être en conscience avec ce qui se vit en soi est très à l’opposé de la performance qui s’appuie forcément sur  un idéal de soi. Un Moi tel que « je devrais être », fantasmé, qui implique une série d’injonctions et de critiques. (On voit fleurir sur les réseaux sociaux une foule de listes d’injonctions à être heureux).  Cela fabrique un Perfectionniste intérieur, un Grand Améliorateur jamais satisfait de nos avancées. Ce Perfectionniste va de pair avec l’idée de performance et a son mot à dire sur chaque domaine de la vie : être un parent parfait, un professionnel hyper-compétent, être parfaitement heureux. Si le Perfectionniste prend les rênes de la thérapie, il faudra avoir tout lu, mettre à profit les techniques de bien-être acquises, se développer intérieurement pour devenir la meilleure version de soi-même, ne plus avoir de blessures. C’est un piège bien entendu.

L’idéal de réalisation est un leurre, une aspiration qui masque et compense des peurs intérieures, des blessures liées à l’image de soi. Voir cette tendance et accueillir toutes les peurs qu’il y a derrière permet non pas de les faire disparaître, mais de cheminer avec soi de façon plus inclusive, sans exclure des parts de soi jugées négatives ou médiocres. 

La thérapie ne vise pas à l’amélioration de soi. Elle nourrit la conscience de soi : faire l’expérience de qui nous sommes plutôt que de vouloir être quelqu’un de précis.

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